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Reconnaissance de l'Etat palestinien, masculinisme, nouvelles du Népal, climatoscepticisme extrême, etc.

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12 min ⋅ 02/10/2025

Palestine : reconnaissance sans action

Le 22 septembre dernier, Emmanuel Macron a pris la parole à l’Assemblée générale des Nations unies pour annoncer que “la France reconnaît aujourd’hui l’État de Palestine”. Ce geste, présenté comme “historique”, fait entrer la France dans le cercle des pays européens qui se sont décidés à franchir le pas : après l’Espagne, l’Irlande, la Norvège ou la Slovénie, c’est désormais un membre du G7 qui reconnaît la Palestine, et ce n’est pas rien. Mais on peut difficilement s’empêcher de se demander pourquoi cette reconnaissance arrive aussi tard et qu’est-ce qu’elle va réellement changer pour les palestinien·nes qui sont les victimes directes et immédiates d’un gouvernement génocidaire ? 

Déjà rappelons que la reconnaissance de la Palestine n’a rien d’une fantaisie diplomatique, c’est une nécessité juridique et politique. Sur le plan du droit international, la Palestine a déjà rempli les critères d’existence d’un État (population, territoire, gouvernement, capacité d’entrer en relation avec d’autres États). Ce qui manquait, c’était la reconnaissance par ses pairs, indispensable pour peser dans les institutions et défendre ses droits. Aujourd’hui, 147 pays reconnaissent déjà la Palestine. La France arrive donc après la bataille, elle qui aurait dû envoyer ce signal depuis bien longtemps. 

Alors oui, ce geste compte. Mais il serait irresponsable de le célébrer comme une fin en soi. Car que vaut une reconnaissance si elle n’est pas suivie d’actes ? Si la France continue de vendre des armes à Israël, elle se rend complice. Si elle ne nomme pas le génocide, elle cautionne le déni. Si elle refuse de sanctionner un gouvernement qui viole ouvertement le droit international, elle fait de la reconnaissance un drapeau vide, sans contenu. L’Espagne a annoncé des sanctions. La France, elle, reste pour l’instant dans les symboles.

En réalité, cette reconnaissance est le strict minimum. Elle aurait dû arriver avant l’invasion de Gaza, avant les milliers de mort·es, avant que la CIJ et la CPI ne sonnent l’alarme. Elle aurait dû être posée comme une évidence de justice, pas comme une opération diplomatique calculée. Et elle ne dispense pas la France de ses responsabilités : cesser immédiatement les exportations d’armes, soutenir activement les enquêtes de la Cour pénale internationale, faire respecter les décisions de la Cour internationale de justice, garantir la reconstruction de Gaza et le droit des Palestinien·nes à disposer d’eux-mêmes.

Macron dit vouloir “ouvrir le chemin d’une négociation utile aux Israéliens comme aux Palestiniens”. Mais depuis quand les négociations peuvent-elles exister sans justice, sans égalité de droits, sans fin de l’impunité ? Reconnaître un État, c’est bien. Mais tant que la France n’assumera pas de nommer la situation à Gaza pour ce qu’elle est , à savoir un génocide, tant qu’elle ne rompra pas avec l’hypocrisie de ses doubles standards, tant qu’elle n’osera pas isoler Israël diplomatiquement, cette reconnaissance restera une demi-mesure. 

Il faut le dire clairement : la France n’a pas fait un cadeau aux Palestinien·nes, elle a seulement rattrapé un retard honteux. Désormais, tout dépend de ce qu’elle fera de ce geste. S’il s’agit seulement d’un symbole pour apaiser une partie de l’opinion, ce sera une imposture. Mais si cette reconnaissance ouvre la voie à de vraies sanctions, à l’arrêt des ventes d’armes, à la coopération pleine et entière avec les juridictions internationales, alors elle pourra être le début d’un basculement.

En attendant, Israël continue ses offensives, bafoue les ordonnances de la CIJ, menace de représailles diplomatiques contre la France. L’histoire retiendra que la France a fini par reconnaître la Palestine, mais elle retiendra aussi qu’elle l’a fait tard, trop tard, et qu’elle ne s’est pas donné les moyens de faire cesser le génocide quand elle le pouvait. 


Le masculinisme, qu’est-ce que c’est ?

Avec le succès de la série Adolescence, la médiatisation d’influenceurs tels que Andrew Tate et Alex Hitchens, le masculinisme s’affiche comme un phénomène de société aussi incompréhensible qu’inquiétant. Comment en 2025, à l’heure de la gen Z, où le féminisme semble avoir conquis tous les milieux culturels et sociaux, se fait-il que des hommes, des garçons, jeunes et moins jeunes continuent de cultiver une telle violence à l’endroit des femmes ? Mais le masculinisme, qu’est-ce que c’est ? Si l’on s’en tient à la définition du Robert, c’est un "ensemble de revendications cherchant à promouvoir le droit des hommes au détriments de ceux des femmes”, avec pour synonyme "antiféminisme". Si l’on en croit leurs fers de lance comme Julien Rochedy, Thaïs d’Escufon mais aussi Eric Zemmour, la masculinité serait en crise majeure, la faute aux féministes qui s’acharnent à créer une société centrée sur les femmes et où les hommes ne trouveraient plus leur place créant ainsi un déséquilibre gravissime. 

Le but des masculinistes serait donc d’œuvrer à remettre les femmes à leur juste place, c’est-à-dire soumises aux hommes. Né aux Etats-Unis à  la fin des années 70 et dans le sillage de la deuxième vague féministe, le mouvement se radicalise avec la fusillade, en 1989, de l’école polytechnique de Montréal où Marc Lépine, déclarant "haïr les féministes", a tué 14 étudiantes. Avec la quatrième vague de féminisme, le mouvement #metoo et surtout le développement des réseaux sociaux, les mouvements masculinistes prolifèrent et se diversifient, avec toujours, en ligne de mire, la haine et des femmes et un ardent désir de revenir à un ordre patriarcal. Dans un article du Monde datant du 19 août 2025 et intitulé "Des Incels aux Lookmaxxers, quels sont les différents courants masculinistes en ligne ?" les journalistes Camille Ribot et Lyssia Gingins recensent les différentes communautés masculinistes, une sorte de jeu des 7 familles vaguement consternant.

La première catégorie regroupe les "Men’s right activist"

Les "anciens" des masculinistes, les MRA critiquent une société gynocentrée et entendent bien reprendre aux femmes les droits qu’elles leurs ont volés. Dans des vidéos Youtube et autres podcasts, ils traquent les soi-disant privilèges des femmes. Leurs revendications sont assez diffuses, mais on y retrouve des groupes d’activistes pour les droits des pères qui critiquent des jugements  qu’ils estiment plus favorables aux mères.

Viennent ensuite les Incels

Les plus connus des masculinistes, leurs revendications se portent sur les questions de séduction et de sexualité. Ils détestent les femmes qui ne seraient tournées que vers les "Chad", c’est-à-dire des hommes très séduisants, les laissant croupir dans leur misère sexuelle. Connus pour leur violence, ils sont bannis des communautés, disons plus acceptables, et leurs forums sont coutumiers des appels au viol, propos racistes, complotistes et ainsi de suite… 

Puis les Passport Bro

Cousin de l’Incel, le "Passport Bro" s’en prend particulièrement aux femmes occidentales qu’ils jugent plus difficiles et trop indépendantes et éloignées des valeurs familiales. Le terme voit le jour en 2011, lors de la sortie d’un docu très controversé qui racontait les voyages au Brésil d’hommes afro-américains venus au Brésil trouver des femmes plus "faciles". La Thaïlande, les Philippines et la Colombie, sont dans le trio de tête des destinations prisées de "Passport Bro".

Et encore les Lookmaxxers

Le Lookmaxxers pourrait être considéré comme l’Incel qui se reprend en main, se relooke et mise tout sur son physique. A mi-chemin entre l’influencing et le développement personnel, les forum lookmaxxers regorgent de conseils pour devenir un "Chad" dont toutes les femmes vont tomber amoureux. Les relations y sont violentes et le harcèlement fréquent.

Sinon les “Men going their own way”

Ceux-là ont choisi une option plus radicale et ont décidé de renoncer aux femmes et aux relations hétérosexuelles, parfois même à la masturbation (le mouvement "no fap"). Mais ce lesbianisme politique à la sauce mascu est loin d’être un simple renoncement aux choses de la chair et leurs discours sont si misogynes que, tels les Incels, ils sont obligés de se regrouper entre eux, et d’avoir leurs propres forums et espaces de discussion.

Les "pick-up artist" pourraient être considérés comme des virtuoses du harcèlement de rue. Leur spécialité, dispenser des conseils de drague afin que n’importe quel homme devienne un as de la séduction et que plus aucune femme ne résiste à leur charme. Totalement étrangers aux notions de harcèlement, de drague lourde et de sens du timing, ils se déploient en une myriade de coachs en séduction et autres gourous du développement perso de la drague, générant une "pognon de dingue" comme dirait l’autre.

L’entrepreneur viriliste appartient à la même famille que le "pick up artist" mais avec une petite touche capitaliste. Incarné en France par l’influenceur Alex Hitchens, sa misogynie crasse voisine avec une obsession pour l’argent et la réussite.   

Et enfin les Sigmas, plus une tendance tiktok qu’une vraie communauté, ils n’en sont pas moins inquiétants puisqu’ils se revendiquent du héros de American Psycho et cultivent une obsession pour la domination. 

Cette plongée dans l’univers masculiniste est d’autant plus effrayante que les mouvements féministes affrontent encore aujourd’hui un profond backlash. En dépit d’avancées majeures et d’une très grande présence médiatique, les résistances sont puissantes et elles s’organisent. Plus inquiétante encore, la difficulté à faire des hommes des partenaires de lutte. Sans aller jusqu’aux Incels et autres Sigmas, et si l’on peut gentiment se moquer du "performative feminist" qui lit du Mona Chollet en terrasse pour voir ses papiers féministes dûment tamponnés, il faut bien reconnaître la réticence des hommes qui peuplent nos vies, amants, amis, époux, pères, frères, collègues, à s’emparer de ses sujets, leur colère parfois face à ce qu’ils estiment être des attaques injustes et essentialistes. Sans tomber dans le piège du "not all men" et sans perdre notre radicalité, il serait peut-être nécessaire toutefois de s’interroger sur des points de discours, de se faire plus stratèges, car si nous pouvons tout à fait vivre sans les hommes, notre lutte à besoin d’eux car nous ne serons jamais assez de trop pour venir à bout du patriarcat.

Climatoscepticisme extrême

Il y a une semaine, à la tribune de l’ONU, Donald Trump déclarait : "le changement climatique est la plus grande arnaque jamais menée contre le monde" ou "Ils disaient que le réchauffement climatique allait tuer le monde… Mais ensuite il a commencé à faire plus froid" et encore que le concept d’empreinte carbone est "une supercherie inventée par des gens aux intentions malveillantes". Cette pensée-là, en contradiction avec toutes les études scientifiques depuis 30 ans, est partagée par de plus en plus de politiques dans le monde.

En Europe, l’extrême droite est un porte-drapeau du climatoscepticisme. Dès 2012, Marine Le Pen accusait les scientifiques du GIEC d’être des "prêtres du changement climatique". Même si elle a adouci sa position depuis, ces collègues européens ne font pas toustes de même. En effet, en Allemagne, l’Alternative für Deutschland (AfD), créditée de plus de 18% des voix en janvier 2024 déclare ainsi qu’aucune preuve scientifique n’atteste la réalité d’un risque de changement climatique, ce qui justifie l’inaction. Quant aux Démocrates suédois (parti d’extrême droite), ils critiquent un supposé manque de fondement scientifique à la crise climatique tandis que le parti espagnol VOX n’a eu de cesse d’attaquer la "religion du climat défendue par Bruxelles", cumulant déni du changement climatique et déni de son soubassement scientifique. Viktor Orban ou Giorgia Meloni ne sont pas en reste, tout comme le neerlandais leader de l'extrême droite, Geert Wilders, qui déclarait : "Cela fait des décennies qu’on nous fait craindre le changement climatique. Nous devons arrêter d’avoir peur". Le vieux continent n’a pas à rougir de son climatoscepticisme. Bolsonaro ou Javier Milei sont le fer de lance sud américain, appelant le changement climatique "un mensonge des socialistes" ou expliquant que "Tous ces politiques qui accusent l'Homme d'être responsable du changement climatique sont bidons."

La population n’est pas tout à fait alignée sur les personnalités politiques. En France, la majorité des Français·es pense que le réchauffement climatique est réel et qu’il est d’origine humaine (62 %, – 2 %), selon le baromètre annuel de l’Agence de la transition écologique (ADEME) réalisé par OpinionWay et diffusé en janvier 2025. Cependant, il est comptabilisé 32 % de climatosceptiques, soit une hausse de 2% depuis le dernier comptage. Aujourd’hui, le recul est plus fort dans les priorités de la population. Là où le changement climatique arrivait encore récemment dans le top 3 des préoccupations, maintenant, le risque n’est plus qu’à la septième place. Cela est aussi le reflet des reculs environnementaux programmés ces dernières années par le gouvernement et ses lois écocidaires comme la loi Duplomd ou les attaques à la biodiversité. La criminalisation des militant·es écologistes pèse aussi dans la balance. L’inaction climatique nourrit la résignation.

Une nouvelle forme de climatoscepticisme émerge de cette tendance : le climatodénialisme ou le doomisme. Dangereux, ces nouvelles formes portent sur la prophétie qu’il est déjà trop tard pour sauver la planète. "On est foutu, on ne peut plus agir” voit-on sur les réseaux sociaux. Cette dénégation génère un contenu viral sur ces derniers, parfois qualifié de "porno climatique apocalyptique". Sur TikTok, le hashtag "Climate Change" totalise 4 milliards de vues avec de nombreuses vidéos aux musiques dramatiques, montrant les dégâts du réchauffement climatique. Des affirmations dramatiques mais non fondées sur la fonte des glaces ou un réchauffement incontrôlable. Ces récits captent l’attention et servent involontairement les intérêts des pollueurs en décourageant l’action collective.

On remarquera que les points communs entre le climatoscepticisme, le masculinisme ou la lutte anti-woke sont la prédominance des discours d’extrême droite et la viralité sur les réseaux sociaux sans contre argumentaire. Pour contrer cette mouvance, des efforts sont à multiplier sur l’éducation, la sensibilisation et l’activisme sont essentiels pour lutter contre l’obscurantisme climatique et sociétal. Nos politiques doivent montrer l’exemple est agir pour ne pas laisser sa population abandonner les combats contre le changement climatisme et la propagation de ces nouveaux dogmes de l’extrême droite.

Entretien : Sonia Awale - "En septembre, le Népal a gagné un changement de régime, mais perdu une part de son humanité"

Le 8 septembre 2025, le Népal a vécu l'un des épisodes les plus sombres de son histoire, de ceux qui marquent un pays, de ceux qui font date. Au moins. 72 manifestant·es sont mort·es dans les rues de Katmandou et plus de 400 ont été blessées suite à un mouvement de manifestations qui dénonçaient la corruption, le népotisme et l’opacité de la classe politique du pays, menant à la démission du premier ministre en à peine 30 heures. Pour Sonia Awale, rédactrice en cheffe du Nepali Times, il s’agit moins d’un sursaut démocratique que du ras-le-bol d’une jeunesse qui considère qu’elle a déjà donné beaucoup de secondes chances à des représentant·es qui ne les représentent plus et laissent le pays dans l’immobilisme. 

par Clothilde Le Coz

Pour Sonia Awale, il y a un avant et un après 8 septembre. La rédactrice en cheffe du quotidien Nepali Times nous a confié que chaque jour de cette deuxième semaine de septembre revêtait une signification particulière. "Nous n'avons pas seulement perdu des jeunes femmes et hommes. Dans ce processus de changement de régime, nous avons perdu un peu de notre humanité.” Derrière les clichés au goût de révolution se tramaient des scènes bien plus dramatiques pour les années à venir. "Notre Parlement et notre Cour Suprême ont brûlé par exemple. Ce sont des milliers de dossiers qui n'aboutiront jamais, des milliers de personnes qui n’obtiendront jamais justice", confie-t-elle. Portée par l'espoir, elle veut croire que tout cela ne sera pas vain et a accepté de revenir sur ces événements pour nous parler de la politique dans son pays… qui n'est pas sans nous interpeller sur la nôtre.

Peux-tu expliquer ce qui a provoqué le mouvement qui a donné lieu à cette répression inédite à Katmandou ? 

De manière générale, j'attribue cela à la frustration de la GenZ face à une classe politique qui s'est déresponsabilisée, détachée de ses préoccupations et surtout devenue la figure de proue d'une corruption décomplexée. Le Népal est une jeune république (la monarchie est abolie depuis 2008) et depuis 2019, la politique du pays est dominée par les coalitions politiques. Depuis trois ans environ, nous avons assisté à une série d'alliances électorales pensées uniquement pour conserver le pouvoir. Contrairement à ses voisins d'Asie du Sud, le Népal jouit encore d'une liberté d'expression et d'une liberté de ton qui se manifestent notamment sur les réseaux sociaux. Face à cette frustration et à un contexte politique qui ne permet aucune évolution, le hashtag #Nepobabies est devenu un véritable phénomène en ligne pour dénoncer le népotisme et la corruption qui rongent le pays. Le 5 septembre, le gouvernement a décidé de censurer 26 applications permettant d’accéder à des réseaux sociaux, enlevant à cette jeunesse la possibilité d’exprimer son mécontentement et de dénoncer ces crimes. La manifestation du 8 septembre est la traduction dans la rue de ce qui se passait en ligne mais qui ne pouvait plus s’y manifester.

Ici, on lit souvent qu’il s’agit d’un véritable moment démocratique pour le Népal. Qu’en penses-tu ? 

Si par "moment démocratique" on entend mouvement d’espoir, oui, il y a de ça. Si par "mouvement démocratique" on entend quelque chose qui permet d’aboutir à la démocratie ou de la faire vivre, c’est moins sûr. D’abord, la première ministre par intérim a été sélectionnée par environ 4 000 personnes sur les 8 000 présentes sur Discord. Je ne sais pas si l’on peut appeler cela la démocratie. Certes, elle est une véritable pionnière et garante dans la lutte contre la corruption, mais il ne s’agit pas à proprement parler d’un vote  représentatif et institutionnalisé. 

De plus, le mouvement qui a vu le jour n’est pas né d’une volonté politique de renverser le pouvoir ou de s’insurger contre un système autoritaire pour promouvoir la démocratie. Il s’agit d’un mouvement différent, sans hiérarchie ni structure qui dénonce la mauvaise gouvernance et la corruption. Cela a provoqué un changement mais aujourd’hui’ j’ignore si cela aboutira à un renouvellement de la classe politique, même si je l’espère. Je me demande d’ailleurs si nous sommes prêtes à élire un·e dirigeant·e directement. Cela pourrait nous retomber dessus, comme c’est le cas ailleurs dans le monde.

Notre gouvernement par intérim a un mandat - celui d’organiser des élections le 5 mars 2026. Il y a beaucoup d’espoir, même s’il y a également un grand sentiment d’instabilité.

Crois-tu que cela change la perception de la politique dans le pays ? 

Vu de Katmandou, j'ai le sentiment que certains groupes voient la monarchie comme un âge d'or en raison de la corruption généralisée et du manque de responsabilité au sein de la classe politique. Il y a une tendance à la voir avec glamour ou romantisme, même parmi les jeunes - et peut-être précisément parce qu'ils ne l'ont jamais vécue. Ce qui ne change pas, c'est que la frustration face à la corruption et au népotisme est si grande qu'une certaine idée du "tout sauf eux" demeure : il faudrait permettre à des personnes honnêtes et éthiques d’entrer en politique et les laisser faire leur travail. Evidemment, Katmandou n'est pas le Népal et je suis curieuse de voir comment ces événements vont façonner le pays. 

À lire 

Mon vrai nom est Elisabeth - Adèle Yon, Éditions du Sous-Sol 

Premier livre saisissant, Mon vrai nom est Élisabeth explore une mémoire familiale fracturée par le silence et la honte. Une chercheuse mène l’enquête sur son arrière-grand-mère, Betsy, diagnostiquée schizophrène dans les années 1950, effacée des récits, devenue “un non-sujet”. Entre archives, souvenirs épars et témoignages, c’est tout un héritage de violence psychiatrique, de tabous bourgeois et de féminité brimée qui se déploie. À la croisée du récit intime, de l’essai et du roman-enquête, ce texte bouleverse par ce qu’il dit des secrets transmis malgré eux, et par ce qu’il restitue à une femme qu’on avait condamnée à l’oubli.

Remember Fessenheim - David Dufresnes, Grasset 

Avec Remember Fessenheim, David Dufresne redonne souffle à une figure que la France a trop vite effacée : Françoise d’Eaubonne, pionnière de l’écoféminisme, militante infatigable, agitatrice géniale. Fondatrice du FHAR, signataire du Manifeste des 121, sur les barricades de 68, elle fut de tous les combats, des luttes féministes à la dénonciation du nucléaire, allant jusqu’à revendiquer un attentat sur le chantier de Fessenheim. À partir des archives intimes de sa grand-mère, de ses apparitions télévisées et des notes des services de renseignement, Dufresne tisse un récit à la fois intime et politique. Un livre incandescent qui ressuscite une “déesse rebelle", et nous rappelle à quel point son héritage écoféministe résonne aujourd’hui. 

Les Forces - Laura Vazquez, Éditions du Sous-Sol  

Laura Vazquez signe un roman-poème hybride, à la frontière du récit initiatique et de l’expérience sensorielle. On y suit une narratrice en révolte contre l’ordre social, traversant bars, maisons abandonnées, montagnes et visions hallucinées. Le texte circule entre le prosaïque et l’abstrait, le comique et le tragique, comme une énergie vitale en mouvement. Dostoïevski, Beckett, Simone Weil planent en arrière-fond, mais Vazquez impose surtout une voix singulière, à la fois drôle, mystique et politique. Une odyssée littéraire qui secoue.

“Le parlement de l’eau” - Wendy Delorme, Cambourakis 

Le récit éco féministe à trois voix incontournable de la rentrée. Wendy Delorme déploie toute sa force narrative et son écriture fluide de tout genre pour conter en trois fils distincts la voix des entités aquatiques, celle de l’autrice qui se questionne sur son propre rapport au fleuve auprès duquel elle vit, et celle des personnages qu’iels écrivent ensemble. Une dystopie où l’espoir affleure et donne à croire en des possibles alternatifs et joyeux.

“Le temps d’après” - Jean Hegland, Gallmeister 

30 ans après son inoubliable “Dans la Forêt”, Jean Hegland continue de tracer les destinées de Nell, Eva et Burl. Né au cœur d’une vie sauvage et d’un monde désolé, le jeune adolescent va chercher à repousser les frontières d’un univers devenu trop étroit pour lui. En s’inventant une nouvelle langue et en tentant de faire confiance aux humain·es qu’il n’a jamais rencontré·es. 

À écouter 

Éditorialiste politique : un métier d'équilibriste - La Fabrique de l’Information, France Culture 

Le recours au “off” et aux échanges informels fait partie intégrante de l’expertise des journalistes politiques, au point qu’ils en sont dépendants pour produire et transmettre une partie de l’information. Cet épisode, de la nouvelle émission de France Culture consacrée à l’information, s’intéresse aux liens entre les journalistes / éditorialistes politiques et les personnalités politiques. 

À regarder

Françoise d’Eaubonne : une épopée écoféministe - Manon Aubel

Dans les années 1970, Françoise d'Eaubonne détonne dans le paysage intellectuel français. Elle est la première à définir l'écoféminisme, dénonçant l'oppression commune des femmes et de la planète comme conséquence du patriarcat. Elle participe aux actions du MLF, à la création du FHAR (front homosexuel d'action révolutionnaire) et théorise la contre-violence, allant jusqu'à saboter le chantier de la centrale nucléaire de Fessenheim. Ce film de Manon Aubel présente pour la première fois des documents inédits, puisant librement dans les manuscrits et archives photographiques qu'elle a légués à l'Institut Mémoire de l'Edition contemporaine, ses proches et des chercheuses, historiennes, éditrices commentent la résonance de son héritage féministe et écologiste. Dispo en VOD et DVD ici : https://sanchoetcompagnie.fr/product/775820279/  

StreetPress cartographie la menace RN aux municipales

StreetPress frappe fort : le média indépendant publie une carte interactive pour mesurer le risque d’une victoire de l’extrême droite aux municipales de mars prochain.

Le principe est simple : un "Nutri-Score" de la démocratie, de A (vert, peu de risque) à E (rouge, danger maximum). En cliquant sur chaque commune, on retrouve les résultats électoraux passés et les scénarios à venir. Selon leurs projections, une centaine de villes parmi les 500 les plus peuplées pourraient basculer RN.

Mais l’idée ne s’arrête pas au constat. StreetPress veut transformer l’angoisse en action. La carte invite à s’abonner à des revues de presse locales, à suivre ce qui se dit sur le terrain, et surtout à s’engager : en deux clics, on peut rejoindre une asso locale, qu’il s’agisse d’écologie, d’éducation populaire ou de solidarité.

Un pari clair : casser le réflexe du scroll fataliste et reconnecter l’info à la mobilisation réelle, hors ligne. Car la bataille des municipales ne se jouera pas seulement dans les urnes… mais aussi dans notre capacité à occuper le terrain avant qu’il ne soit occupé par d’autres.

A découvrir ici : https://www.streetpress.com/sujet/1758633869-plan-extreme-droite-conquerir-villes-france-carte-bataillemunicipales-marinelepen-ericciotti-rassemblementnational-electionsmunicipales




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